Barabbas, célèbre criminel condamné par Pilate pour meurtre et émeutes dans la ville (Lc 23,19), mais gracié ensuite à la demande du peuple la veille de Pâques, est mentionné par les quatre Evangélistes. C’est là quasiment tout ce que nous savons de lui. Il n’y a aucun témoignage concernant les émeutes qu’il avait provoquées, les victimes de ses meurtres et la façon dont il vécut après son amnistie inattendue. On cependant supposer que c’était une émeute contre les Romains : à cette époque les Juifs supportaient difficilement la domination romaine sur leur pays.
Certains manuscrits anciens de l’Evangile de Mathieu contiennent cependant un détail intéressant. Barabbas y est mentionné par son prénom : Jésus.
Dans la première moitié du IIIe siècle de notre ère, ces manuscrits étaient nombreux, comme en témoigne Origène, maître chrétien qui vivait à cette époque. Beaucoup de copies, pourtant, ne mentionnaient plus que le nom de Barabbas. Origène approuvait cela, car : «Le nom de Jésus ne doit pas (…) désigner un malfaiteur». D’autant plus qu’en ancien hébreu, Jésus signifie « sauveur ».
Et Barabbas ? En araméen, langue parlée à l’époque en Judée, Barabbas signifie « fils du père ». A première vue, c’est une absurdité : il est évident qu’un homme est le fils de son père. Mais l’Evangile oppose à Barabbas Jésus Christ, qui n’avait justement pas de père terrestre, mais seulement un Père Céleste !
Aussi, le peuple rassemblé devant le Prétoire (résidence de Ponce Pilate), était placé devant un choix des plus grave. Il devait choisir entre un Jésus, venu dans le monde de Dieu le Père pour sauver les hommes du péché et de la mort, et un autre Jésus, né d’un homme ordinaire et promettant aux Juifs de les sauver d’une domination étrangère.
Et le peuple choisit Barabbas, et le Christ fut condamné à mort.
On peut, bien sûr, mettre la faute sur les grands prêtres. Ce sont eux, certes, qui ont tout fait pour convaincre la foule de faire ce choix. Mais la foule rassemblée a rejeté avec trop de force les tentatives de Pilate de libérer le vrai Sauveur. Elle a crié avec trop d’enthousiasme : Que son sang soit sur nous et sur nos enfants (Mt 27, 23).
Barabbas, quant à lui, avait fait son choix personnel bien avant les évènements de l’Evangile : il avait préféré le royaume terrestre au Céleste. Dans l’Evangile, il apparaît comme le symbole du choix qui a été fait par le peuple qui se considérait comme élu de Dieu. Ce peuple qui, au lieu du Sauveur, a choisi un «sauveur »…
Bien évidemment, cette tragédie ne touche pas seulement le peuple d’Israël. Cela peut arriver à n’importe quel peuple trop imbu de sa fierté nationale.
Il y a toutefois quelque chose de consolant dans la figure de Barabbas. Le pécheur, qui devait mourir, mais qui a été libéré parce que le Christ est mort à sa place : c’est l’image de chacun d’entre nous ! La seule question à se poser est : avons-nous conscience du Sacrifice qui est fait pour nous, et, conscients de cela, changeons-nous pour autant notre vie ?